Vendeuil, situé sur la grande route qui va de La Fère à Saint-Quentin, souffrit beaucoup des guerres qui désolèrent notre pays au cours des siècles on avait pu croire après la construction du château que les ennemis se seraient écartés du village. Il n'en fut malheureusement rien et Vendeuil fut plusieurs fois ravagé et ses habitants réduits à la plus grande misère. Toujours ils résistèrent. S'ils succombèrent, ils firent payer cher à leurs ennemis le prix de leurs victoires.
Dès 1177, sous le roi Louis VII le jeune, Vendeuil fut brûlé par les Anglais et par le Comte de Hainaut. En 1373, une armée anglaise commandée par le Duc de Lancastre, après avoir ravagé la Picardie et la Champagne, s'avança dans la Thierache en suivant la Vallée de l'Oise. En 1589, Vendeuil fut encore pillé et incendié.
En 1639, le régiment de Semilbrocq fort de deux cents hommes occupa le village durant dix-sept jours, pillant et rançonnant les habitants, tuant leurs bestiaux, abattant et brûlant soixante-douze maisons. La même année, le régiment de Langres y campa pendant dix-sept jours et on évalué à 18.000 livres la perte causée aux habitants. En 1640, trois compagnies de soldats, le régiment de Bouillon et un régiment Allemand y séjournèrent pendant trois jours occasionnant une perte de 6000 livres. Le 28 ou 29 mai 1642, l'armée du Maréchal de Guiche campa à Vendeuil : perte 9000 livres. Le 9 octobre 1645, les ennemis s'en prirent aux habitants; en deux fois, vingt notables furent enlevés, conduits à Cambrai et rançonnés. Après leur avoir dérobé 4.500 livres, ils en tuèrent un.
En mai 1646, plusieurs compagnies commandées par Monseigneur le Comte de (le manuscrit ne porte pas le nom) séjournèrent à Vendeuil et occasionna une perte de 15.000 livres. C'est une nouvelle contribution de 18.000 livres qu'exigèrent les habitants, en avril 1648, quatre compagnies du régiment de Grassion qui demeurèrent quinze jours à Vendeuil. En Octobre de la même année, neuf compagnies de l'armée du sieur Erlacq logèrent à Vendeuil. Elles y commirent les plus grands désordres. En 1649, la veille de Pâques, le village fut pillé, l'ennemi emportant pain, avoine, fourrage, pour une valeur de 2000 livres. Quand il était contraint de se retirer, ce n'était pas sans dommage pour le village qui était incendié. Le 7 juin 1650, des troupes commandées par Turenne et le Comte de Fuensaldagne logèrent à Vendeuil et commirent les pires excès, et particulièrement un corps de cavalerie composé de gens sans aveu et qu'on désignait sous le nom de marouis. Au début de juin 1650, l'armée ennemie campa de Ribemont à vendeuil et s'avança même jusqu'à Travecy. Les habitants s'enfuirent et demeurèrent cachés dans les bois durant trois mois. Cette année s'était à peine retirée que 20.000 soldats de l'armée Française commandés par le Maréchal de Plessis-Pralin, le Marquis d'Hocquincourt, Villequier et Rose, se groupèrent autour de Vendeuil et Travecy pour délivrer Guise assiégée par les Espagnols. Ils dévastèrent les jardins et les champs, pillèrent les demeures et brûlèrent cent quarante maisons. A leur départ il n'en restait plus que trente six debout. En 1656, Monsieur de Fon, lieutenant général de Saint-Quentin, écrit que la misère est si grande dans toute la région qu'il ne reste plus d'habitants dans les villages qui eussent seulement de la paille pour se coucher.
Vendeuil fut plusieurs fois dévasté entièrement non seulement par les ennemis et en particulier par les soldats Espagnols et polonais appelés en France et qui y commettaient toutes sortes de méfaits, mais par les troupes de Turenne qui vinrent en Picardie au moment de la fronde. C'est par bandes de 1.500 hommes que les soldats allaient à la maraude, officier en tête, tambours par devant, canons par derrière. Chaque nuit éclairée par l'incendie d'un village ou tout au moins d'une ferme. La ruine s'étendait partout et César d'Estrées, évêque de Laon en 1656 constate que les curés de plus de cinquante paroisses, n'ayant plus de paroissiens sont obligés de se retirer dans les villes.
Les paysans tentaient souvent de résister par les armes au pillage et de véritables batailles s'engageaient. Le fait se produisit notamment en 1674. En mai de cette année, le prince d'Orange avait rassemblé une armée de 70.000 hommes (Allemands, Espagnols, Hollandais) et avait résolu d'envahir la France par les frontières de Champagne et de Picardie. Un contingent de 1500 hommes sous les ordres du Baron de Quincy projette alors d'établir un camp dans les villages proches de La Fère, parmi lesquels se trouvait Vendeuil. A l'annonce de l'arrivée des ennemis, les cloches de l'église appellent les habitants aux armes. Le Maire et le gouverneur du château établissent deux centres de résistance : l'un au château, l'autre à l'église. Ils distribuent des armes, des munitions et des vivres, et chacun jure de mourir à son poste plutôt que de se rendre. Pendant ce temps, un certain nombre d'hommes armés s'avancent au devant de l'ennemi, jusque Cerisy mais, inférieurs en nombre, ils doivent se replier sur le village suivis par les troupes du Baron de Quincy qui donnent l'assaut. Après une sanglante bataille de rue, les défenseurs reculent et cherchent un refuge dans l'église. Les soldats de Quincy après avoir incendié à moitié du village s'approchent de l'église pour y mettre le feu. Mais ils sont accueillis par les coups de feu des Vendeuillois retranchés dans le clocher. Parmi eux se trouve un brave dont on a conservé le nom : Simon Fer. Le Baron de Quincy, étonné de cette résistance, donne l'ordre à ses soldats d'enfoncer les portes de l'église et de fusiller tous ceux dont ils pourront s'emparer. C'est alors que Simon Fer l'abat d'un coup d'arquebuse. Les ennemis, voyant leur chef mortellement blessé, s'enfuient en désordre mais se vengent en mettant le feu à l'hospice et à d'autres maisons du bourg. Les Vendeuillois, ayant à leur tête Simon Fer, les poursuivent et exaspères par le spectacle de leurs maisons brûlées, fondent sur les ennemis avec tant d'impétuosité, qu'en peu de temps les rues sont jonchées de cadavres. Plus de 600 soldats (Espagnols et hollandais) trouvèrent la mort dans cette affaire. Malheureusement, entraîné par son ardeur, Simon fer est tué. pour honorer sa mémoire, on donna son nom à la rue où était sa maison. Ce nom lui a été pieusement conservé mais beaucoup de Vendeuillois ont perdu le souvenir de celui qui le portait. Les hommes ne furent pas seuls à combattre ce jour là; les femmes aussi acharnées se lancèrent au plus fort de la mêlée. L'une d'elles, dit-on, armée d'un marchepied de l'église assommait les ennemis qui se trouvaient à sa portée. Un des soldats du Baron de Quincy blessé qui gisait à terre, lui demandant confession avant de mourir, elle lui répondit : "t'as brûlé em'mason, v'la et confession" en l'achevant d'un coup de marchepied.
Après le combat, les habitants de Vendeuil recueillirent les ennemis morts et les enterrèrent. Les blessés furent soignés dans les quelques maisons restées intactes (110 maisons furent brûlées ce jour-là).
Après avoir quitté précipitamment Vendeuil, les soldats ennemis gagnèrent Rémigny qu'ils incendièrent en grande partie. Les habitants s'enfuirent dans les bois de Jussy. On parla longtemps de cette glorieuse affaire et comme en France tout finit par des chansons : il se trouva quelqu'un pour célébrer l'héroïsme des Vendeuillois et se moquer de leurs voisins. Malheureusement, de cette chanson, il ne nous est parvenu que les deux couplets suivants :
La Baronne de Quincy, vint jusqu'à Vendeuil pour demander l'autorisation d'emporter le corps de son mari, mais les Vendeuillois refusèrent et le Baron fut inhumé derrière le chœur de l'église.
La glorieuse défense de Vendeuil fut connue du roi Louis XIV. Il récompensa les habitants en leur accordant l'exemption de la taille et de la capitation pendant cinq ans. Les espagnols revinrent l'année suivante à Vendeuil et ils furent repoussés avec une perte de trois cents hommes.
Le village se ressentit de toutes les guerres de Louis XIV et de Louis XV car il eut à supporter de nombreuses réquisitions et les excès des soldats, notamment en 1744 quand Louis XIV quitta ses troupes occupées en Flandre pour se porter au secours de l'Alsace, à la tête de vingt-trois bataillons et trente-trois escadrons. Il prit la route de Saint-Quentin, Vendeuil, La Fère, Laon, Reims, se dirigeant sur Metz où il arriva le 5 août 1744.
Monsieur A. Larive qui a retracé l'histoire de Vendeuil, a trouvé peu de documents de cette époque intéressant le village. On sait cependant qu'à la publication du décret du 15 mars 1790, les habitants secouèrent le joug de certains droits seigneuriaux, d'autres furent rachetés. Un nouveau moulin fut construit par les Vendeuillois, ainsi qu'un atelier de salpêtre. La fête de la fédération fut célébrée à Vendeuil au jeu de battoir. Un autel en gazon surélevé de plusieurs marches y avait été dressé et le curé d'alors Monsieur Vieville y dit la messe. Le même Monsieur Vieville à cette époque fut condamné à un mois de prison pour avoir contrevenu aux ordonnances. A son retour, il prêta serment à la constitution, ce qui ne l'empêcha pas de dire secrètement la messe dans les caves du village. Le 25 messidor an III, un certificat de civisme lui fut délivré, il était ainsi libellé : "certificat de civisme délivré à Vieville ministre du culte catholique et ci-devant curé de vendeuil". Le 2 thermidor an III, Vieville s'est soumis aux lois de la République et à fait la déclaration suivante : "je reconnais que l'universalité des citoyens français est le souverain et je promets soumission et obéissance aux lois de la République."
Pendant la révolution, les croix et le coq qui surmontaient le clocher furent remplacés par deux piques, l'oriflamme, le bonnet de la liberté et une couronne de laurier. Des ateliers travaillaient pour l'armée, bourrellerie, forge, atelier de salpêtre avaient été installés dans l'église. On faisait l'école dans le chœur et le conseil municipal s'y réunissait. Les objets à usage du culte furent vendus au district de Saint-Quentin. Si les habitants de Vendeuil contribuèrent par leur travail au succès des armes révolutionnaires, ils profitèrent de leurs victoires ; c'est ainsi que le 10 pluviose an II, le maire envoya chercher à Moy la quantité de savon assignée au village, pendant des victoires remportées par nos soldats.
Les Prussiens poursuivant les armées Napoléoniennes arrivèrent à Vendeuil le 18 février 1814. Les réquisitions furent tellement nombreuses que M. Martin notaire pouvait écrire le 1er mai 1814 : Vendeuil est la commune la plus malheureuse. Non seulement du Canton de Moy, mais de l'arrondissement de Saint-Quentin. La moitié des habitants est sans pain ; ils paissent dans les prés où ils mangent des pissenlits, des salsifis et autres racines ; l'autre moitié ne mange point la moitié du pain dont ils ont besoin, l'autre quart se retranche et n'arrivera pas à la moisson si la providence ne s'en mêle. Les réquisitions se doublèrent d'exactions (c'est ainsi qu'Augustin Lacheroy fut ligoté et faillit être fusillé. Il ne dut la vie qu'à l'intervention d'un homme Esch d'origine Allemande qui habitait Vendeuil).
Après l'abdication de Napoléon 1er le 14 octobre 1814, le Maire et les Conseillers Municipaux durent prêter serment de fidélité à Louis XVIII ce qui n'empêcha pas les réquisitions de continuer. Elles étaient d'autant plus nombreuses que de forts détachements de soldats étaient cantonnés à Vendeuil, envoyés par le Commandant de la Fère. Les souffrances des habitants augmentèrent à la suite de la terrible disette de 1816. En cette année, la pluie ne cessa de tomber pendant la moisson et les blés germèrent partout. La récolte fut insuffisante et le pain fait avec le blé germé était tel qu'en le jetant contre les murs il y restait attaché. Vendeuil se releva vite car quinze ans plus tard sa population atteignait 1646 habitants.
Il y avait une torderie pour tissus, une filature de coton et un marché se tenait sur la place tous les jeudis. Dès 1824, la commune avait fait l'acquisition d'une pompe à incendie.
En 1831, la garde nationale réorganisée comprenait deux compagnies. La première comptait un capitaine commandant, un lieutenant, un sous-lieutenant, quatre sergents, huit caporaux, un tambour et cinquante-neuf soldats. La deuxième comptait un capitaine commandant, un lieutenant, un sous-lieutenant, quatre sergents, huit caporaux, un tambour et cinquante-sept soldats, en outre la compagnies des pompiers comprenait un officier, un sergent-major, un sergent, deux caporaux, un tambour et dix-sept pompiers.
La prospérité dont jouissait Vendeuil au début de XIX°siècle allait malheureusement prendre fin. Lors de la période révolutionnaire de 1848, le prix du pain s'éleva considérablement et les ouvriers se trouvèrent sans travail. Un club révolutionnaire dépendant de celui de la Fère fut crée. Deux fois par semaine, des conférences étaient donnés à Vendeuil dans la salle de danse de M.Lantenoy qui tenait un café (aujourd'hui disparu) en face de l'église. Ces conférences durèrent deux mois. Les esprits étaient très surexcités, afin de calmer la population et remédier à la misère grandissante, on créa des ateliers communaux. De grands travaux de réfections furent entrepris sur la route de Vendeuil, à Brissay-Choigny dont le niveau fut relevé, ce qui la mit à l'abri des débordements de l'Oise.
Mais les ouvriers employés à ces travaux ne touchaient que soixante centimes par jour. Or le pain valait à cette époque 0.50 f. le kg. Il leur était donc impossible de vivre avec un pareil salaire. Il réclamèrent une augmentation qui leur fut refusée par M. Lecat Adjoint au Maire. Les ouvriers s'attroupèrent alors devant la maison de l'Adjoint, proférant des menaces à son adresse. Des cris "à mort Lecat" furent poussés et des grès lancés dans la porte de son habitation pour la défoncer. M. Lecat ayant saisi son fusil et menaçant de tuer ceux qui essaieraient de pénétrer dans sa cour, l'affaire menaçait de tourner au tragique lorsque M. Vinchon, Maire, qu'on était allé prévenir arriva. M. Vinchon, ancien notaire, était un homme très considéré. Il réussit à calmer les ouvriers et tout rentra dans l'ordre.
Cette année là, le lundi de la fête patronale, deux étrangers, arrivant en voiture, avertirent le Maire que les insurgés étaient sortis de Paris pour piller la campagne, on les avait signalés à Chauny. Il fallut prendre des mesures immédiates pour les empêcher de pénétrer dans le village.
Le tambour battit le rappel et la garde nationale, commandée par M. Tardieu, prit les armes. La fête de Vendeuil fut finie; les baraques disparurent et les habitants rentrèrent chez eux, très alarmés. Désirant se rendre compte par lui-même de la réalité du fait annoncé, M. Tardieu partit à cheval et gagna Chauny sans encombre. Apprenant que le bruit était sans fondement, il revint si vite à Vendeuil que son cheval tomba mort en arrivant.
Nota : afin de commémorer cette page importante de notre histoire, au cours d'une cérémonie présidée par M. Dassonville, Maire et qui rassembla toutes les sociétés locales et une grande partie de la population, le 9 mai 1948 a été planté un "arbre de la liberté" au pied du grand escalier de l'école. Les enfants assurèrent la partie artistique.
De 1848 à 1870, aucun fait notable n'est à signaler dans l'histoire de Vendeuil. On enregistre seulement de nombreux départs d'hommes aux armées. La guerre de 1870, allait troubler cette quiétude. A la suite de nos défaites, la France fut envahie et les habitants de Vendeuil eurent à subir de nombreuses réquisitions et des vexations de toutes sortes.
Le samedi 3 octobre 1870, six cents Prussiens environ se présentèrent à Saint-Quentin alors que les hommes du Canton de Moy se présentaient pour passer le conseil de révision. Jean-Baptiste Théodore Philbert Emery, de Vendeuil fut tué. Le 20 octobre, les Prussiens arrivèrent à Brissay-Choigny au nombre de quatre à cinq mille. Ils prirent la route de Vendeuil afin de passer la nuit dans cette localité, mais les ponts du canal et de la rivière ayant été coupés par ordre du préfet Anatole de la Forge, ils se virent obligés de coucher à Brissay-Choigny et dans les villages voisins. Ils donnèrent l'ordre aux habitants de Vendeuil de rétablir les ponts pendant la nuit, le travail devant être achevé pour six heures du matin, sous peine d'une contribution de 20.000 f et de voir Vendeuil incendié et les notables fusillés. Si les ponts étaient rétablis à l'heure fixée, la contribution était réduite à 10.000 F. Le travail fut terminé à l'heure et la contribution couverte par un emprunt. Le 21 octobre à huit heure, du soir, ils passaient sur les ponts rétablis au nombre de 4500 se dirigeant vers Saint-Quentin. Trois cents logèrent à Vendeuil et prirent ensuite la route de La Fère. Le samedi 22 octobre, quelques notables furent délégués auprès du Colonel Von Kahlden pour obtenir une réduction de la contribution. Ils obtinrent gain de cause et la somme à payer fut ramenée à 7500 F. Le 23 octobre, le colonel Von Kahlden fit son entrée à Vendeuil à la tête d'une troupe de 3.500 hommes et consentit à la commune une nouvelle réduction de 500 F. Le paiement de cette somme devait, selon l'engagement pris par l'ennemi garantir les habitants contre toute réquisition, ce qui n'empêcha pas les soldats cantonnés à Vendeuil d'exiger ou de voler tout ce qu'ils convoitaient. Vendeuil dut encore payer sa part du million réclamé au Département soit 2.600 F et ensuite les impôts de l'année qui avaient été préalablement versés au gouvernement français. Les impôts, plus que triplés, montèrent à 52.000 F. Le 25 octobre, on entendit le bombardement de La Fère. Des habitants de Saint-Quentin, de Moy et des villages voisins passèrent à Vendeuil se dirigeant vers Travecy pour voir ce bombardement.
Plusieurs furent pris et retenus prisonniers jusqu'à l'arrivée du premier commissaire municipal M. Wafflart Ducoin assisté de M. Dauge car les personnes arrêtés se disaient de Vendeuil. L'un des prisonniers fut accusé d'avoir tiré un coup de fusil et les Prussiens menaçaient de bombarder et d'incendier Vendeuil. Le malheur fut évité, les prisonniers furent relâchés mais Vendeuil fut condamné à fournir cent quatre vingt neuf quintaux d'avoine et cent quatre-vingt bottes de foin. Le 9 décembre, mille deux cents soldats français envoyés pour essayer de reprendre La Fère aux Prussiens logèrent à Vendeuil.
Le lundi 12 décembre, 12 à 1500 autres soldats Français arrivèrent à Vendeuil. Le 13, les troupes françaises logées à Travecy, refluèrent vers Vendeuil qui dut alors loger 5 à 6000 hommes de troupe. Après le départ de ces troupes le 2 janvier 1871, les Prussiens vinrent faire de nouvelles réquisitions qui furent suivies de nombreuses autres. Cet état de choses dura jusqu'au 13 avril ; aussi ce fut avec un grand soulagement que les Vendeuillois virent partir les derniers soldats Prussiens.
Vendeuil paya un lourd tribut à la première guerre mondiale. Occupé dès la fin de septembre 1914, le pays eut à subir les multiples réquisitions imposées par l'envahisseur et à héberger constamment des contingents allemands. Le village, vide de ses habitants, fut ensuite complètement rasé lors du premier recul allemand. la ligne de résistance, baptisée "ligne Hindenburg" étant proche de l'Oise qui traversé précisément Vendeuil n'était plus un monceau de ruines.
Les habitants revinrent quand même, et se remettant encore une fois courageusement au travail. Ils redonnèrent vie au pays. La reconstruction fut rapidement menée; le village a fait peau neuve mais la route nationale qui le traverse à conserver (pour peu de temps encore puisqu'une voie nouvelle passe en dehors du village) son tracé sinueux du temps des diligences. L'église a été reconstruite en suivant de près les plans de son aînée, mais la Mairie ne porte plus la fière devise des seigneurs de Vendeuil :
Et c'est encore un peu du passé qui s'en est allé. Ainsi disparaît peu à peu ce qui fit la grandeur du village et le progrès s'efforce d'en effacer jusqu'au souvenir. Quant aux écoles, elles ont fui la grand'place et grâce à un don substanciel d'un des Maires de Vendeuil, M. Carette, un peu à l'écart de la route nationale, s'est élevé un coquet groupe scolaire auquel on accède par une allée plantée de tilleuls et un magistral escalier qu'un obus, malheureusement à fortement endommagé en 1940 et qui a été réparé depuis.
Durant cette période, Vendeuil n'éprouva pas de sérieux dégâts et ses souffrances ne sont pas comparables à celles éprouvées par nos cités martyres.
Néanmoins, il eut à supporter les pillages consécutifs à l'évacuation massive de ses habitants les 10 et 17 mai 1940 (les Allemands y pénétrèrent le 18) et bien rares furent ceux qui retrouvèrent leur mobilier intact au retour. Ce retour s'échelonna sur de nombreux mois, Vendeuil se trouvant compris dans la zone "interdite" la plupart des habitants y rentrèrent par ruse, au péril de leur vie.
Comme partout ailleurs, les réquisitions furent pesantes, l'occupant se montrant de plus en plus exigeant au fur et à mesure qu'augmentait la résistance à son emprise. Cette résistance se manifesta par l'obéissance aux consignes que transmettait la radio française de Londres et par des manifestations aux anniversaires des grands jours de notre histoire : 11 novembre, 14 juillet. Elle atteignit son point culminant le 14 juillet 1944. Ce jour-là, le monument aux morts disparut littéralement sous la jonchée d'une odorante moisson de fleurs, tandis que les femmes arboraient des cocardes tricolores et que nos drapeaux, plus vivants que jamais, claquaient au vent d'une victoire désirée, pressentie. Des hommes de tous âges, de toute classe résistèrent d'une manière soit passive, soit active à l'emprise ennemie, refusant le travail, sabotant les lignes de communication, s'opposant aux réquisitions, aidant ainsi à la victoire.
En février 1943, sous l'impulsion de quelques ardents patriotes, un groupe de résistance qui comprenait plus de cinquante personnes s'organisa à Vendeuil. Il était rattaché au secteur de la Fère dont le chef, le colonel Laurent, fut arrêté le 17 novembre 1943 et déporté. Son successeur, M. Rault, fut arrêté à son tour le 17 juin 1944 et est décédé au camp de Sandbostel en Allemagne le 12 mai 1945.
Le groupe fut alors rattaché au secteur de Saint-Quentin et eut pour chef le Capitaine Corette qui fut tué à Fontaine Notre-Dame au cours d'une mission, avec une vingtaine d'autres patriotes quelques jours avant la libération.
En mars 1944, des armes, des munitions et des explosifs (pesant 2.700 kg) furent amenés à Vendeuil et entreposés dans un souterrain du fort en ruines pour être ensuite répartis entre les hommes et utilisés au cours des besoins. Tous les ordres de sabotages provenant du haut commandement furent ponctuellement exécutés : lignes de chemins de fer, aiguillages, ponts, pylones, locomotives etc subirent tour à tour des dommages tels qu'ils furent rendus momentanément inutilisables. L'activité de nos résistants conjuguée avec celle des membres de la grande armée clandestine de France désorganisa la défense allemande et hâta le jour de la victoire. L'année 1944, fut marquée dans notre région par les bombardements meurtriers du centre ferroviaire de Tergnier auxquels assistèrent, impuissants et angoissés tous les Vendeuillois. Les habitants de tergnier, Fargniers, Quessy et Vouel durent chercher refuge dans les villages voisins et Vendeuil en accueillit une partie. Les 27 et 28 Août 1944, les Allemands, furieux de ne pas trouver la main d'œuvre demandée, organisèrent une chasse à l'homme dans le village et les résistants gagnèrent les bois et les fourrés. Durant les derniers jours d'Août, une agitation fébrile s'empara des troupes allemandes cantonnés à Vendeuil et aux environs : nombreux combats aériens, passage de soldats de toutes armes, mise en batterie de canons à proximité du village puis l'inénarrable défilé des bandes dont l'uniforme seul indiquait qu'on avait affaire à des soldats et qui rappelait l'exode des Français en 1940, puis repli des soldats employés à la gare de Tergnier, poussant devant eux voitures d'enfants ou brouettes, spectacle réjouissant pour ceux qui avaient souffert de notre défaite et que les Vendeuillois contemplaient avec une souriante ironie.
Les craintes légitimes des habitants n'étaient pas à leur terme. Le 1 septembre, plusieurs otages sont pris à Vendeuil, parmi lesquels quatre résistants : M. Dolle, Prémont Raymond, Oberle, Sablain Henri, emmené à Moy, parqués dans une pâture et menacés d'être fusillés (une mitrailleuse était braquée sur eux) si une gêne quelconque était apportée à la retraite des troupes allemandes à cause de cela on ne put empêcher l'ennemi de faire sauter le pont du canal situé entre Vendeuil et Brissay-Choigny et qui ne fut rétabli qu'en novembre 1946.
Les otages furent libérés le lendemain à la grande joie de tous. Avant de quitter le village, un groupe Allemand de nettoyage mit le feu au garage Beaudier qui contenait essence et munitions. Alors que des pompiers volontaires s'efforçaient de protéger les maisons voisines, deux soldats allemands dont l'un grièvement blessé à la mâchoire, passèrent, mitraillette en mains. Ce furent les derniers soldats ennemis libres qui traversèrent Vendeuil. Le groupe fit au cours des dernières heures de l'occupation soixante-six prisonniers dont un Colonel. Il est à noter que pour Vendeuil seul, dès la libération, dix-sept jeunes gens s'engagèrent comme volontaires dans les armées alliées.
Enfin le 2 septembre 1944, dans l'après-midi, les troupes américaines firent leur entrée dans Vendeuil. Elles furent accueillies par une immense clameur jaillie de toutes les bouches. Spontanément, issue de centaines de poitrines, une vibrante Marseillaise couvrit momentanément le bruit des moteurs; des drapeaux aux couleurs alliées, confectionnés en cachette, flottèrent bientôt au-dessus des têtes; des mamans tendirent leurs enfants aux soldats amis pour qu'ils les embrassent ; les yeux s'embuèrent. Tandis que défilaient voitures et tanks, M. Dolle s'était offert pour guider les troupes américaines. Il revint quelques heures après, ayant fait seul, un prisonnier. Le 2 septembre 1944, fut une journée inoubliable pour les habitants.